Jusqu'où aller ?

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J'avais prévu un article beaucoup plus politique, mais la conjoncture étant ce qu'elle est, je préfère pour le moment vous renvoyer ici et . A vous de faire vos propres déductions.
La bafouille du jour portera donc sur le "jusqu'où aller"? Ce n'est pas politique, mais social. Vous vous souvenez peut-être, quand ce blog a commencé, j'avais évoqué l'effet Norpois. Sans réptéer quelque chose qui a déjà été dit, je ne puis m'empêcher de m'interroger sur les rapports humains - particulièrement, sur les limites entre relations, copinage, amitié... Il faut dire que mon métier se prête particulièrement bien à la confusion des genres. J'aimerais pouvoir plaquer mon cher Aristote sur ces frontières mal définies, mais ce n'est pas aussi simple. Pour Aristote, il y a trois genres d'amitié.
- l'amitié par intérêt : un échange de bons procédés qui prend fin dès que l'on cesse de répondre aux demandes de l'autre.
- l'amitié par plaisir : on partage des passions, on fait la fête et on reste ensemble tant que c'est sympa. On s'aperçoit souvent qu'hélas, passé ces bons moments partagés, on n'a pas grand-chose en commun.
- l'amitié véritable : ou amitié vertueuse. On aime l'autre en tant qu'autre - c'estg le parce que c'était lui parce que c'était moi de Montaigne.
Mais ce n'est pas si simple. A part le fait que l'on puisse passer progressivement d'une amitié intéressée à une amitié véritable, que la dernière n'exclut pas nécessairement la deuxième voire la première, il y a à mon sens beaucoup d'autres éléments qui entrent en jeu. L'incertitude, d'abord. L'affection, ou non, que l'on peut risquer dans un "nouveau rapport d'amitié". L'attente. D'une réciprocité, évidemment - ce qui fait qu'à la mode proustienne, on s'interroge sur l'autre "pourquoi il ou elle ne manifeste pas autant d'empressement que moi ?" Tout ceci sachant que, de notre côté, nous pouvons mettre un ou une nouvel (le) ami (e) dans le même embarras, par exemple en n'étant pas équitable dans un échange de mails. Ce qui, de notre point de vue, est logique "euh, pas le temps..." mais du sien peut être pris comme un rejet. L'équité est-elle donc nécessaire en amitié ? Eh bien, n'étant pas kantienne pour deux sous, je dirai que ce n'est pas le problème... L'amitié, nous y mettons en gros ce que nous voulons. Mais... Mais... ce qu'il y a de plus difficile, c'est une fois encore d'accepter l'autre, la différence - et sa différence affective, l'expression est moche, mais je n'ai pas trouvé mieux. Jusqu'où aller ? Cela pose la question à la fois de "jusqu'où se mouiller en matière d'amitié" et "jusqu'où aller en matière d'exigence vis-à-vis de ses amis ?" En somme, pour aristotéliser tout ça, si je fréquente x en considérant que c'est "parce que c'est lui" et que x me fréquente "parce que c'est fun", suis-je en droit de lui reprocher quelque chose si je suis consciente de cette "inégalité" ? Ne pouvais-je, moi, faire un peu attention où je mettais les pieds ? OK, ces questions peuvent paraître un peu bateau, mais une bonne partie de la littérature et du cinéma les posent - et elles n'ont toujours pas de "vraie" solution (ce qui fait à mon sens tout leur intérêt).
Personnellement, j'aurais tendance à dire que c'est mieux de prendre les gens comme ils sont - mais force est de constater que ce n'est qu'un vernis. Un vernis bien confortable, plutôt joli - mais n'empêche...
Nobody's perfect.
Bref, et ce, sans compter ces fameux "gens qui ont changé". Bon, ma génération a tendance à dire "je susi devenu adulte" - le tout avec le bébé, la copine ou le copain (ou pacs, au choix), et un brusque renversement de valeurs qui va du "j'arrête le jeu de rôles, j'suis adulte" à "faut être réaliste, on ne va quand même pas payer pour csw c.. qui sont des assistés"...
Zut. me voici repartie sur une critique de fond : les aléas de l'égoïsme ordinaire.
Autant s'arrêter là.
Sinon, le "jusqu'où aller" sera allé trop loin - affaire de limites...


Lycée : amie ou ennemie ?

Publié dans charlottebousquet

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C
Aristote pose tout un tas d'autres questions, tout de même!! LUi. (contrairement à kant, qui... bref...) Le vieillissement - ben c'est bien ça devenir adulte dans sa tête, non, rien de plus ? laisser son esprit se figer dans une norme étroite... Bref.
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F
Comme d'habitude, superbe chronique. Mais ce n'est pas "ta" génération qui a tendance à se penser comme adulte dès que des "signes" objectifs la positionne comme telle aux yeux de la société. C'est le propre de toutes les générations (et ce n'est pas complétement faux non plus). En revanche, il me semble que le danger, c'est le vieillissement qui peut conduire à "s'économiser" dans les échanges affectifs, à rétrécir la curiosité des autres, de l'autre. Tout est bien plus complexe que ne le pensait Aristote donc.
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