Amitiés

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Il me semble que j'ai déjà évoqué plusieurs fois la thématique de l'amitié sur ce blog, notamment à propos de l'analyse qu'en fait Aristote dans ses deux éthiques (Nicomaque et Eudème). Outre un très long questionnement sur les différents aspects de l'amitié, ses limites possibles, savoir si la question de l'intérêt doit ou non entrer en compte - Kant, des siècles plus tard, dira que la véritable amitié n'existe pas parce qu'il faudrait une part égale de respect et d'amour, et que cela ne peut se mesurer donc... - etc. L'intérêt est évidemment quelque chose auquel on a coutume d'attribuer une connotation péjorative, mais qui ne l'est pas nécessairement. Ce que pose Aristote, c'est tout simplement que l'on fréquente quelqu'un - on développe, entretient, chérit - une amitié aussi parce qu'on y prend plaisir. Donc, de l'intérêt. Et ce n'est pas si grave. A la limite, cela rejoint ce que développe Michel Terestchenko à propos de l'altrusime - ce n'est pas juste une illusion parce qu'on est tous égoïstes, ce n'est pas juste un acte de sacrifice, c'est quelque chose de bien plus nuancé et certainement pas mesurable, quantifiable, justifiable ... comme le voudraient certains philosophes.



La question du jour ne porte pas là-dessus, en fait, mais sur la distinction aristotélicienne entre les différents degrés d'amitié.
- Les relations - intérêt et échanges de bons procédés.
- La camaraderie - on partage des centres d'intérêts, on prend plaisir à être ensemble.
- L'amitié - au-delà du être là l'un pour l'autre, on partage des valeurs fondamentales. Valeurs éthiques, en général.
Ces différents degrés ne sont pas exclusifs absolument les uns des autres, l'intérêt peut engendrer le plaisir qui peut engendrer l'amitié véritable. Et il y a tout un panel de naunces dans ces différentes amitiés, heureusement d'ailleurs. Même si cela brouille parfois les limites.
Or, quand ces limites resurgissent, cela peut faire très mal - quand on s'aperçoit que l'on a donné plus que ce que l'on a reçu, par exemple, mais c'était peut-être plus le fruit d'une "mauvaise lecture" de l'amitié - ou être assez fulgurant, quand on s'aperçoit que soi-même, on pose des limites que l'on n'avait poas vues ou pas voulu voir, ou pas jugées importantes sur le moment. c'est-à-dire, quand on s'aperçoit qu'Aristote a raison. Pas toujours, sinon, il s'appellerait Dieu... Mais sur ces degrés... Ce qui est très étonnant, c'est d'avoir expérimenté de manière totalement anecdotique cette fulgurance. Au détour d'une dispute/ discussion avec une personne que l'on a inconsciemment classée comme amie - selon l'échelle d'Aristote - , qui finalement, parce qu'il y a une divergence morale profonde, ne peut pas l'être. Reste une camarade - toujours selon l'échelle. Et ce n'est même pas une décision prise sous le coup de la colère, c'est juste quelque chose qui apparaît comme une évidence - et qui finalement touche d'autres domaines que Tersthcenko appelle présence à soi - qui est simplement qu'il y a certaines valeurs - éthiques, culturelles, humaines - qui sont tellement importantes, tellement évidentes - avec fulgurance, c'est le mot du jour - que non seulement elles doivent être défendues, mais également que ne pas les défendre serait renoncer à ce qui nous constitue en tant qu'individu.

Drôle de constat. Que l'on peut, à mon avis, étendre en ce moment à l'université - par exemple.

Publié dans charlottebousquet

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C
Quoi ? Tu n'as pas lu le vent dans les saules ??????? mais c'est une honte! c'est un bouquin génial!!!
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E
tu sais, à propos de ça, je lisais hier sur amazon le résumé du livre Le Vent dans les Saules (bin oui, je projette de me l'acheter un de ces quatre, je crois pas l'avoir lu étant petite) et ça parle d'animaux sympas et d'un crapaud vaniteux, ça m'a rappelé quelque chose mais je ne sais pas si dans l'histoire le crapaud revient à la raison, je verrai en le lisant :)
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L
Je crois qu'il y a ça aussi bien chez les garçons que chez les filles, mais que les garçons sont dans une culture de non-dit, alors comme c'est pas dit, c'est comme si ça n'existait pas. Mais c'est pas vrai.
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N
Beaucoup moins il me semble.(ou alors je suis encore une fois à côté de la plaque ?)
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C
Il n'y a pas ça chez les hommes ?
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